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Boucles d’or et les trois ours

Richard Morin

William Poulin

Mise à jour :
10
January
2024
Mise à jour :
January 10, 2024

Dans un conte ancien d’origine écossaise, Boucles d’or (Goldilocks) entre dans la maison des trois ours alors qu’ils sont absents, mange le bol de gruau de l’ourson qu’on avait laissé à refroidir sur la table et le trouve parfait : ni trop chaud ni trop froid. Elle s’endort ensuite dans le lit de l’ourson.

Le conte de Goldilocks est souvent invoqué pour désigner un certain état de grâce de l’économie : ni trop chaude (sans pressions inflationnistes), ni trop froide (une croissance stable et le plein emploi). Les marchés financiers se sont comportés au dernier trimestre de 2023 comme si les banques centrales avaient réussi à gérer un improbable atterrissage en douceur de l’économie et vaincu l’inflation qui sévissait depuis 2 ans, sans provoquer de récession. En un mot, Goldilocks.

Le consensus sur les marchés boursiers est que – ayant vaincu l’inflation – les banques centrales pourront baisser les taux d’intérêt en 2024, ce qui serait une bonne nouvelle pour à peu près tout le monde, incluant les entreprises cotées en bourse. Après avoir subi une correction de la fin juillet à la fin octobre, l’indice S&P 500 des actions américaines a donc fortement rebondi en novembre et décembre – alors que l’hypothèse de l’atterrissage en douceur faisait de plus en plus d’adeptes – pour terminer l’année en hausse de 26,3%. Les actions canadiennes ont connu une année plus ordinaire, en hausse de « seulement » 11,8%.

Le marché obligataire a lui aussi fortement réagi, alors que le rendement à échéance des obligations américaines échéant dans 10 ans est passé de 5% à la mi-octobre à 3,9% en fin d’année. Inversement, le cours des obligations en portefeuille a augmenté de 9,9% durant cette période et de 6,7% en 2023.

Ces rendements des 2 principales classes d’actifs ont permis au portefeuille équilibré (60/40) d’enregistrer une hausse de plus de 10% en 2023.

Sans vouloir jouer les rabat-joie, on doit cependant rappeler que nous ne sommes pas nécessairement sortis du bois, puisque le plein effet d’une hausse de taux d’intérêt peut prendre jusqu’à 2 ans avant de se faire sentir. On ne peut donc exclure la possibilité que l'économie mondiale subisse une récession en 2024.

C’est peut-être ainsi qu’on doit interpréter la forte hausse du cours des obligations depuis 2 mois : on en achète non seulement parce qu’elles offrent désormais un revenu intéressant, mais aussi parce qu’elles protègeront la valeur du portefeuille en cas de récession.

Dans les versions les plus anciennes du conte, lorsque les ours reviennent à la maison, ils tuent ou effrayent Boucles d’or afin de la mettre en fuite. Dans les versions plus récentes, ils sont beaucoup plus gentils et vont même jusqu’à lui indiquer le chemin du retour vers sa maison. Dans notre cas, souhaitons que les ours ne reviennent simplement pas à leur maison en 2024!

Bonne année à tous!

Revue des marchés

Classes d'actifsRendement en C$
4e trim.AÀD
Obligations canadiennes8,3%6,7%
Actions
- Canadiennes8,1%11,8%
- Amériacines9,0%23,2%
- Internationales (EAFE)7,7%15,4%
- Marchés émergents5,3%8,7%

Actions canadiennes : encore Shopify

Comme la plupart des bourses mondiales, les actions canadiennes ont affiché des gains importants au cours des deux derniers mois, en hausse de 8,1% sur le trimestre, portant la performance annuelle à 11,8%.

La bourse canadienne est pauvre en titres de technologie (9% de l’indice par rapport à 29% aux États-Unis). Il est donc d’autant plus remarquable qu’un titre de technologie – Shopify, +119,4% pour l’année – explique à lui seul plus de 40% du rendement de l’indice canadien en 2023. Les actions de cette entreprise de commerce électronique demeurent quand même en baisse de près de 50% depuis leur sommet atteint en 2021, ce qui illustre bien les aléas de la sélection de titres.

Les perspectives économiques plus encourageantes pour 2024 ont particulièrement profité au secteur de la finance avec un rendement de 11,7% sur le trimestre et de 9,1% pour l’année.  

Le prix du baril de pétrole a légèrement baissé au cours de l’année, expliquant le rendement modeste de 1,0% du secteur de l’énergie.

Les obligations offrant à nouveau des rendements intéressants, les actions à dividendes élevés ont perdu de leur attrait, ce qui explique en partie la sous-performance des secteurs des communications et des services publics, en baisse de 9,2% et 4,3%, respectivement.

Le ratio cours/bénéfice de l’indice canadien S&P/TSX est de 13,7x , contre 19,8x pour l’indice américain S&P500. Cet écart reflète en bonne partie l’évaluation plus élevée accordée aux titres de technologie qui dominent la bourse américaine. Non seulement les actions canadiennes sont-elles moins chères, mais elles versent aussi beaucoup plus de dividendes : 3,2% au Canada contre 1,5% aux États-Unis. Les investisseurs américains auraient avantage à venir faire quelques achats au nord de la frontière.

SecteurRendements
S&P / TSX
Composite
S&P 500
(en USD)
Énergie1,0%-4,8%
Matières-3,3%10,2%
Industrie10,5%16,0%
Consommation discrétionnaire8,5%41,0%
Biens de consommation de base10,5%-2,2%
Soins de santé (incluant cannabis)15,6%0,3%
Finance9,1%9,8%
Technologie de l'information68,8%56,4%
Communication-9,2%54,4%
Services publics-4,3%-10,2%

Actions américaines : encore les technos

Il y a maintenant une décennie que la bourse américaine bat les autres bourses mondiales, essentiellement grâce à la technologie. 2023 n’a pas fait exception, avec une hausse en dollars canadiens de 9,0% sur le trimestre et 23,2% pour l’année.

Contrairement aux prédictions pessimistes des « experts » en début d’année, l’indice S&P 500 a donc à peu près effacé ses pertes de 2022. Pour sa part, l’indice NASDAQ 100 – encore plus lourd en titres technos – a connu sa meilleure année depuis 1999 (peu de temps avant l’éclatement de la bulle techno!), en hausse de 55,1%.

Comme c’est généralement le cas, les secteurs ayant le plus souffert lors de la baisse de 2022 ont connu les meilleurs rendements en 2023 : technologies (+56,4%), services de communications (+54,4%) et consommation discrétionnaire (+41,0%). Les derniers seront les premiers !

Deux facteurs expliquent la résurgence de ces secteurs. D’une part, les signes de ralentissement de l’inflation leur profitent davantage, puisque leur évaluation est beaucoup plus sensible aux variations de taux d’intérêt. D’autre part, l’idée que l’intelligence artificielle (IA) puisse émerger comme un nouveau moteur de croissance pour les grandes sociétés technologiques a engendré beaucoup d’engouement chez les investisseurs.

Surnommées les «Magnificent Seven», sept entreprises ont été les principales bénéficiaires de la ruée vers l'IA, contribuant à plus de 60% du rendement du S&P 500.

Rendement des "Magnificent Seven" en 2023

Au cours des deux derniers mois, les titres de petite et moyenne capitalisation ont aussi très bien fait, réduisant l’écart de rendement qui les sépare des grandes capitalisations.

Actions internationales : ça bouge au Japon

Les actions internationales ont offert un rendement en dollars canadiens de 7,7% sur le trimestre et de 15,4% pour l’année.

Principal marché international en capitalisation boursière, le Japon est présentement au centre d’une réforme importante qui vise à encourager les entreprises à miser davantage sur la croissance et la valeur de leur titre en bourse. De plus, on offre de nouveaux avantages fiscaux pour inciter les ménages japonais à investir dans les actions. Ces incitatifs, associés à une croissance économique robuste et des taux d'intérêt bas, expliquent sans doute la performance de 27,1% des actions japonaises en 2023. Cependant, la dépréciation du yen par rapport au dollar canadien ramène le rendement de l'investisseur canadien à 15,8%.

De l’autre côté de l’Atlantique, les perspectives économiques commencent également à s’améliorer, ce qui a permis aux actions européennes de connaître un excellent trimestre, en hausse de 10,2%, ainsi qu’ un rendement de 16,3% sur l’année. L’Italie et l’Espagne, menées par le rendement de leurs banques, se sont classées au sommet des bourses européennes, en hausse de 31,3% et 26,0% respectivement.

Marchés émergents : ralentis par la Chine

L’indice MSCI Emerging Markets a affiché un rendement de 5,3% en CAD pour l’année 2023, alors que la sous-performance des actions chinoises a jeté une ombre sur l’excellente année des autres principales bourses émergentes.

En raison d'une reprise économique en-deçà des attentes, exacerbée par la crise immobilière et les tensions commerciales avec les États-Unis, les actions chinoises ont enregistré une baisse de 11,4% au cours de l’année. Les déboires de la Chine ne datent pas d’hier, comme en témoigne le graphique ci-dessous. En attendant la reprise, on achète ces actions à rabais lorsqu’on rééquilibre systématiquement le portefeuille, comme le fait Archer.

La bourse chinoise sous-performe

Ailleurs dans les marchés émergents, Taiwan (32,5%) et la Corée du Sud (26,3%) sont les bourses qui se sont le plus démarquées, dû en grande partie à leur concentration dans le secteur technologique.

On doit également mentionner la performance des actions indiennes, en hausse de 25,9% en 2023. Comme nous l’avions mentionné l’an dernier à pareille date, l'Inde profite en partie de l'arrivée de capitaux étrangers se retirant de la Chine.

Obligations : brusque retour du pendule

Après avoir effleuré la barre des 5% à la mi-octobre, le rendement à échéance des obligations 10 ans américaines s’est rapidement replié à 3,9% en fin d’année. Au Canada, le rendement à échéance des obligations 10 ans a terminé l’année à 3,1% et le portefeuille obligataire a gagné 6,7%.

Comme pour les actions, c’est la mort annoncée de l’inflation qui a déclenché la forte hausse du cours des obligations en fin d’année. Moins d’inflation signifie un rendement réel (net de l’inflation) anticipé plus élevé pour les obligations, ce qui les rend plus attrayantes.

Ceux qui ont cédé à la tentation d’acheter des CPG à 5% plutôt que des obligations à plus longue échéance ont déjà perdu. Ils risquent fort de renouveler leur CPG à un taux nettement inférieur en 2024.

Si l’économie mondiale subit une récession en 2024, on comptera sur les obligations pour faire le gros du travail dans le portefeuille, alors que les actions subiront une correction. Autrement, on pourra quand même compter sur les versements d’intérêt.

Obligations 10 ans - rendement à échéance